Samedi 14 novembre 1992, 21h
Interpréter le plus parisien des chanteurs vaudois est la gageure à la se sont affrontés R. & D. Après «le cercle des poètes disparus», on ne craint plus les fantômes, on s’arrange même pour les rendre vivants. Les chanteurs du Limousin servent une émotion mi-fervente, mi-familiale incarnée dans un accent (pas vaudois pour un sou) qui fleure bon les cabarets parisiens. Elle traduit toute l’ironie, l’humour, l’esprit de la généreuse carrière. En revisitant l’œuvre de Gilles, on verra qu’en 1917 déjà, il crée le rôle du diable dans «L’histoire du soldat», qu’en 1934 il a le prix du disque, et qu’avec «Label France» il lance, en 1936, l’hymne du front populaire. Durant la guerre, nous sommes à l’heure des cabarets et de la résistance, avec Edith Piaf, notamment. Après les véhémences de l’engagement, le poète repense au pays, raconte la Venoge, s’en prend à Nestlé, à l’armée ou encore aux bétonneurs du paysage. En 1979 arrive l’heure des hommages et la chanson romande entame «Dollar» pour saluer la sortie de l’artiste. Amis authentiques, Rabetaud et Desmond interprètent Gilles avec une force rare, une présence indéniable dans deux voix parfaitement mariées.